L'architecte d'intérieur Tristan Auer, qui signe entre autres L'Hôtel de Crillon et Les Bains, à Paris, incarne ce nouveau style contemporain qui privilégie l'art de vivre plutôt que le design show off.
Fini le temps des restaurants, hôtels ou palaces qui dupliquent à l'infini le style d'un designer. Désormais, l'architecte ou le décorateur s'effacent derrière ceux qui vivent et créent. Tristan Auer revendique aujourd'hui un statut d'artisan-ensemblier qui fait son succès. « Nous sommes une petite fabrique qui travaille entièrement sur mesure, explique-t-il. Une pièce ou une salle doit autant tenir compte de la personnalité de ses propriétaires que du volume et de la lumière de l'endroit. » Et pour lui, point de 3D, il présente des croquis faits à la main et vient toujours en rendez-vous avec une masse d'échantillons de belles matières. « Cela doit autant impliquer le client que parler à son affectif », précise-t-il.
À Courchevel, l'architecte signe l'hôtel 5* La Sivolière, où il a inventé une nouvelle modernité avec un mobilier sur mesure réalisé par des artisans d'art. Pour les nouveaux Bains, qui rouvrent au printemps, il mixe l'esprit 1980 avec le luxe bourgeois du XIXe siècle. Les pièces mythiques comme la piscine carrelée par Philippe Starck, sont conservées quasiment « dans leur jus », tandis que le bureau de l'ancien propriétaire, Hubert Boukobza, devient un restaurant dirigé par Philippe Labbé.
Pour le nouvel Hôtel de Crillon, Tristan Auer est encore dans l'antidesign. « Tout est construit pour durer trente ans en faisant passer la fonctionnalité du lieu dans le XXIe siècle. » La structure d'époque est conservée, avec, là aussi, un mobilier qui apporte délicatesse et intensité. La finalité étant toujours de penser au bien-être des personnes qui séjournent ici. Il pousse cette idée à son paroxysme dans un hôtel de Saint-Barthélémy, où les chambres sont conçues selon le rythme des journées et des nuits que l'on y passe. Les salles de bain sont ainsi plus importantes que les chambres « car au bord de la mer, c'est là que tout commence et finit », explique Tristan Auer. De même, les dressing-rooms avec canapés, ouverts sur la plage : « Ce ne sont pas des placards, quand le soir arrive, on construit là son allure pour sortir », précise-t-il. Bref, Tristan Auer est l'architecte des épicuriens.