Steeve Broutin
Avec la crise du Covid-19, les volumes de la vente à emporter ou livrée se sont envolés. Il en est de même pour les emballages alimentaires et les contenants servant au transport des repas. C’est tout l’enjeu de la loi anti-gaspillage pour l’économie circulaire (dite loi « AGEC ») : faire évoluer les modes de production et de consommation vers un modèle plus vertueux, en limitant au maximum les déchets et en favorisant le réemploi. L’interdiction du plastique jetable à compter du 1er janvier 2023 amène notamment les acteurs de la restauration rapide et livrée à repenser leur activité autour de la traçabilité. Une évolution sur laquelle revient Steeve Broutin, Expert solutions Retail & AGEC de Hub One.
Selon les chiffres du Ministère de la Transition Écologique, plus de 200 millions de repas ont été livrésen France en 2019, générant plus de 600 millions d’emballages à usage unique. La fin du plastique jetable est l’un des axes majeurs de la loi AGEC. De profonds changements sont opérés pour transformer l’économie linéaire (produire, consommer, jeter) en une économie circulaire. Comment les enseignes intègrent-elles ce cadre réglementaire ? Quelles solutions s’offrent au secteur de la restauration rapide et à emporter ?
Quelles sont les conséquences de la loi AGEC sur la restauration rapide ?
À compter du 1er janvier 2023, le plastique jetable disparaîtra des circuits de la restauration rapide et boulangère. Selon l’Agence de la transition écologique (Ademe), la restauration à emporter génère chaque année plus de 220 000 tonnes d’emballages en France. Il s’agit de la principale source de pollution plastique des milieux aquatiques. Pour stopper ces déchets, les pouvoirs publics poussent au réemploi, c’est-à-dire à l’utilisation de contenants réutilisables et recyclables. Depuis plusieurs années et suite à la crise du Covid-19, le marché de la restauration livrée progresse de 20 % par an. Face à ce constat, 19 acteurs de la restauration livrée ont signé une charte et s’engagent à limiter leurs déchets et à trouver des solutions plus durables pour les repas à emporter.
En effet, l’objectif est d’atteindre 50 % des emballages livrés sans plastique à usage unique d’ici le 1er janvier 2022, puis 70 % au 1er janvier 2023. Cette charte marque une continuité de la loi antigaspillage de février 2020. À ce jour, des mesures concrètes ont déjà été mises en place : la fin de la livraison systématique des couverts et sauces dans les commandes depuis mars 2021 et le remplacement des sacs plastiques par des sacs compostables pour les livraisons.
Les impacts liés au passage du jetable au réemploi dans les restaurants
Le passage au réemploi le 1er janvier 2023 oblige le restaurateur à maîtriser la vaisselle disponible pour assurer le service du midi et/ou du soir, et ce en continu et sans rupture. La vaisselle jetable était plus compacte – et donc plus simple – à stocker, le restaurateur devra dorénavant disposer du stock juste pour ne pas immobiliser de l’espace et de la vaisselle pour rien. L’installation d’un système de lavage en interne ou le recours à un industriel en externe modifie également l’approche du service. L’enjeu est de taille, sans vaisselle propre et en volume suffisant, ce sont potentiellement des clients qui ne sont pas servis et donc du chiffre d’affaires perdu. Mais le principal enjeu reste de minimiser la perte de la vaisselle. En effet, toutes enseignes confondues, les premiers tests indiquent une perte de 15 à 40 % de la vaisselle, qui est soit jetée soit volée par les consommateurs, un réflexe qui changera avec le temps mais qui à ce jour impacte l’investissement.
Un système de traçabilité de la vaisselle réutilisable : une solution technologique fiable
Comment intégrer la traçabilité pour gérer les contenants réutilisables ? Dans le cadre d’un dispositif de consigne, et pour transformer cette contrainte réglementaire en un levier de développement puissant, les enseignes peuvent tracer les allers-retours des contenants alimentaires grâce au tag RFID (Radio Frequency Identification). Ce dispositif a l’avantage d’être intégré dès la phase de fabrication du contenant. Ainsi, il est possible de tracer la vaisselle à toutes les étapes : livraison dans le restaurant, retour par le consommateur et phase de lavage – dans un contexte de reverse logistique – avant de reprendre son cycle initial. Pour les enseignes, le tag RFID est aussi efficace pour gérer le prélèvement de la consigne auprès des consommateurs et monétiser des contenants de manière à alléger, voire neutraliser les coûts d’investissements.
Accompagner la transformation du secteur
Mais quelles que soient les solutions envisageables, le suivi des stocks et de consigne digitalisée devient une évidence. Ces solutions amèneront à des changements profonds : investissements, transformation des processus métier et digitaux, expérimentation… Chacun avance à son rythme selon ses contraintes techniques, humaines et financières, d’où les disparités d’actions entre les différents acteurs. Pour cela, le recours à des experts offre un accompagnement à la transition écologique dans lequel des solutions globales permettent de repenser le business model.
Concernant la traçabilité des contenants, cette solution devient non seulement écologique mais aussi économique, voire marketing (données des consommateurs plus précises). Enfin, la loi AGEC peut faciliter la montée en gamme des enseignes. Ces dernières pourront prôner une stratégie plus respectueuse de l’environnement, loin de l’image traditionnelle de la « Junk food » qui colle encore
beaucoup à la peau du secteur de la restauration rapide.
Octobre 2022