Naïs Pirollet.
Dans le numéro 617, nous avions publié un portrait de Naïs Pirollet, qui prenait alors le temps de se poser les bonnes questions sur la suite de sa carrière, qui se fera dans la brigade d'Anne-Sophie Pic à Valence.
Elle goûte au calme après trois années où elle s'est concentrée sept jours sur sept sur le Bocuse d'or. La violence de la transition, tout comme « l'effet boomerang de la fatigue accumulée » , elle s'y était préparée. « J'en profite pour me poser les bonnes questions sur ce que je veux faire. » Sur LinkedIn, l'intitulé de son poste est toujours « candidate au Bocuse d'or ». Une manière bien particulière de démarrer une carrière. « En dehors du Bocuse, je n'ai que deux ans d'expérience [chez David Toutain à Paris, ndlr]. »
Mais elle sait que si les propositions affluent, ce n'est pas par hasard. « Je pense avoir apporté des choses au niveau de la team France». Sa plus grande fierté, c'est d'avoir « accroché des gens qui n'étaient pas dans cet environnement, même si ce dépoussiérage a été impulsé par GL Events depuis quelques années ». Sûrement parce qu'elle a su « compenser ce manque d'expérience en s'entourant des personnes, autant au sein de la team qu'avec des chefs satellites comme Jérôme Banctel, qui portent d'autres façons de penser notre gastronomie » .
C'est ainsi qu'elle a marqué les esprits lors de l'épreuve Feed the kids, qui la laissait pourtant sceptique au départ, elle qui a été depuis son plus jeune âge « habituée à manger de tout, sans que ça ressemble à un dinosaure ». Avec des goûts purs et un montage « joueur mais artistique », elle a touché un jury d'adultes enclins à la nostalgie. « La cuisine, c'est une usine à souvenirs, on en crée et on en suscite. »
Naïs Pirollet dit avoir toujours été claire par rapport à cette aventure : « Ce n'était pas un accomplissement, mais un exercice. » La Briançonnaise se destinait au départ à une école d'ingénieurs plutôt qu'à l'Institut Paul-Bocuse. Et elle a pu laisser s'épanouir son esprit cartésien dans la R & D, d'abord pour Davy Tissot. « L'approche du cuisinier est plutôt d'enchaîner les essais. Mais quand on arrive à comprendre, cela fonctionne encore mieux ! »
Autres compétences à faire valoir, l'organisation du travail et l'optimisation de l'espace, acquises durant cette période. Car « la transmission, ce n'est pas que dans un sens ». Consciente de ce qu'elle peut apporter à une équipe, « et non une brigade », elle n'est guère attirée par les organisations pyramidales. Et a bien conscience que « sept jours sur sept comme je l'ai fait pendant trois ans ce n'est pas viable. Ça va un temps pour une course avec un objectif, mais ça ne peut pas être le rythme d'une vie. Il faut se forcer à respirer pour être meilleur après, et nous n'avons pas tous les mêmes besoins ni les mêmes façons de respirer. D'où l'importance de se connaître soi-même ». Ce à quoi elle s'emploie aujourd'hui, avec une certitude : il lui faut du challenge. Et elle a hâte de la suite.