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Manger bon, sain, ou les deux

ENCARNA BRAVO ET YANNICK NODIN

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Manger bon, sain, ou les deux

Caldereta de langouste

© Sucré Salé

Une restauration qui marie le goût et les propriétés nutritionnelles, le plaisir et la santé... Mais si, c'est possible ! Portée par les recommandations du PNNS, par l'évolution de la cuisine et des attentes des consommateurs, elle gagne doucement et sûrement du terrain en France. Dès lors qu'elle n'interdit rien, mais invite à manger de tout sans excès.

« Parmi le nombre des causes qui concourent à détruire la santé des hommes, la plus générale et la plus fertile à engendrer toutes les maladies humaines, c'est la mauvaise qualité de nos aliments, occasionnée par la méthode pernicieuse de les préparer. C'est pourtant la seule à laquelle on n'a pas encore cherché à remédier. » Ces propos sont extraits de l'ouvrage d'un médecin, Jourdan Le Cointe, publié en... 1792. Bref, les préoccupations de nutrition et santé restent, le contexte change, et les exigences du consommateur plus encore. En France, en tout cas, où il veut tout et son contraire : des conseils nutritionnels, l'affichage des calories, mais sans limiter les produits gras et sucrés. Il a entendu les messages du Programme national nutrition santé (PNNS) diffusés depuis 2001 : « Mangez au moins cinq fruits et légumes par jour », « Mangez, bougez », etc. Mais de là à les appliquer...

Pourtant, le PNNS a défini trois plans quinquennaux et tout a été mis en place pour faciliter le suivi de leurs recommandations. « Nous pouvons affirmer qu'une vraie dynamique a été initiée en France, avec un cadre de référence, explique le professeur Serge Hercberg, principal initiateur du programme. La consommation de fruits et légumes a augmenté chez les adultes et celle du sel a diminué. Et le nombre de cas d'obésité et de surpoids chez les enfants est stable, il tend même à baisser. »

Pour autant, les objectifs en termes de consommation de gras et de sucré ne sont pas atteints. Et les messages concernant la nutrition ont été perçus plus facilement par les catégories sociales favorisées que par les autres. « Cette fracture est assez ancienne, note Gilles Fumey, professeur de géographie à Paris-Sorbonne, spécialiste de l'alimentation et des cultures alimentaires. Sous l'Ancien Régime, le peuple mangeait beaucoup moins bien que les aristocrates, qui avaient accès à des produits riches et variés. L'écart s'est creusé également dans les villes, où sont les restaurants. Aujourd'hui, le gap porte plus sur la qualité car l'accès à la nourriture a été simplifié et il n'y a pas de famine, même si les gens malnutris sont nombreux. »

Quoi qu'il en soit, alors que nous sommes à la veille du PNNS 4, Serge Hercberg est convaincu qu'il faut continuer et renforcer les démarches d'information ainsi que les actions sur l'activité physique et l'offre alimentaire. Qu'en est-il de la notion de plaisir ? « Nous essayons clairement de ne pas l'opposer à la notion de santé ; réduire le gras et le sel peut se faire sans diminuer la qualité du produit. C'est un discours qui nous unit avec Michel Guérard. Les cuisiniers nous montrent que l'on peut manger bon sans ce que cela soit défavorable sur le plan nutritionnel », explique le président du PNNS. Mais qu'est-ce qu'une alimentation saine pour un consommateur aujourd'hui ? « Les analyses montrent par exemple que les femmes, lorsqu'elles travaillent, optent plus volontiers pour les grosses tartines que pour la salade. Elles n'ont pas plus d'appétit qu'hier, mais à prix égal, elles préfèrent un plat qui va les rassasier », commente Rémy Lucas, de Cate Marketing.

Le prix, d'abord !

Un mouvement assez général. Si le Français peut s'offrir quelques feuilles de salade avec un filet de citron pour 10 euros, car c'est sain, il préférera des céréales , des féculents, des légumineuses, des sucres lents. « On n'a jamais vu sur les cartes autant de pommes de terre, de pâtes... », note Rémy Lucas. Ajoutez à cela un soupçon de thé vert et quelques grains de grenade riches en antioxydants, et le tour est joué, il a bien mangé. « Ce n'est pas le médical qui guide ses choix. Il cherche un bon rapport quantité/énergie/prix ! Quand on parle de léger, ce n'est pas sur un plan nutritionnel. »

Cela signifie d'abord de petites quantités, voire des bouchées... même s'il s'agit de boulettes de houmous, de petites cuillères de pâte à tartiner au chocolat ou de crème de marron. La texture, aussi, peut exprimer l'idée de légèreté, notamment celle de la mousse. Qui peut concerner même du marron passé au siphon ! La légèreté peut être également liée à un ingrédient bénéfique pour le corps. Mais il s'agit moins d'une vitamine que d'un produit riche en antioxydants, par exemple du thé vert dans un financier, alors que la recette se compose quand même de sucre, de farine, de poudre d'amande... Le financier acquiert alors les vertus attribuées au thé vert. De même pour le chocolat : sa teneur en magnésium bonne pour le moral et l'humeur peut faire oublier qu'il est aussi riche en gras et en sucre.

Léger, certes, mais beau aussi

Cette notion de légèreté toute subjective passe aussi par la couleur (vive les roses ou les verts pâles) et la température. En fin de repas, une glace est bienvenue pour faire passer le repas, quand un gratin aux fruits tiède évoque quelque chose de lourd. « Le consommateur est de plus en plus perturbé par le nombre croissant d'insertions santé : lactose, gluten, etc., ajoute Rémy Lucas. Dans ce contexte, il a envie de se faire plaisir. En fait, il faut revenir au bon sens, manger de tout un peu, sans abus ! » Dans cet esprit, d'ailleurs, les chefs ont allégé leurs sauces, le jus de légumes remplace les fonds, les cuissons utilisent moins de matières grasses. Il semble que ces notions soient désormais intégrées - rarement revendiquées -, Michel Guérard a fait école. Cela correspond à une culture, il n'est pas de bon ton de dire que l'on mange léger, on préfère parler d'authenticité. « L'homme ne se nourrit pas seulement de nutriments, mais aussi de symboles », les mots du professeur Jean Trémolières, spécialiste de la nutrition, sont plus que jamais d'actualité.

30 % La proportion d'adultes obèses en France en 2042, si les tendances observées depuis 1997 sur la progression de l'indice de masse corporelle persistent. Source : Obépi-Roche, 2012.

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