Le croissant, héritage ottoman ou viennois ?

FLORENT BEURDELEY
On a tôt fait d'associer le croissant à Vienne. Mais si la capitale de l'Autriche n'est pas étrangère au roi de nos petits déjeuners, son berceau pourrait se trouver en Turquie.

L'histoire du croissant divise. Star incontestée du petit déjeuner français depuis les années 50, il aurait été créé par les Turcs lors du siège d'Istanbul au XVIe siècle. Voilà pour la première version. Une autre nous apprend qu'il viendrait en fait de Vienne, en Autriche. Pour célébrer la défaite des Turcs lors du siège de leur ville en 1683, les boulangers viennois ont créé une brioche en forme de croissant (un des symboles sur le drapeau de l'ennemi), dans le but de n'en faire qu'une bouchée ! De là proviendrait le mot « viennoiserie », passé dans le langage courant.

Fourré ou en version salée

Les premiers croissants ont été vendus au 92, rue de Richelieu, à Paris, entre 1837 et 1839, quand les Autrichiens August Zang et Ernest Schwarzer y ont ouvert une boulangerie viennoise. De là à symboliser le petit déjeuner à la française... Il a fallu attendre la fin du XIXe siècle pour que nos boulangers le réinventent en remplaçant la pâte briochée par une pâte feuilletée. Cette transformation, sans toucher à la forme particulière du croissant, en a radicalement changé le goût, faisant de lui une gourmandise typiquement française.

Aujourd'hui, les boulangers l'ont diversifié, et l'on entend souvent le fameux « beurre ou ordinaire ? ». Comprenez : beurre ou margarine ? Mais il peut être aussi fourré au chocolat, aux amandes, et se décline en version salée, roulé au jambon et au fromage.

Du beurre et du temps

Alors, les secrets d'un bon croissant ? « Du beurre, et du beurre de qualité. Le choix du beurre, sa typicité de goût vont se retrouver dans le croissant. Je travaille avec un laitier indépendant, qui sait exactement ce que je cherche : un goût franc et différent », témoigne Guillaume Delcourt, second prix du meilleur croissant de Paris en 2010. Des ingrédients, certes, mais aussi du temps : « Un bon croissant, c'est trente heures, entre le moment où l'on pétrit la pâte et le moment où on le sort du four. » Les malheureux clients touchés par des intolérances alimentaires peuvent se rabattre sur le croissant ordinaire, un « pis-aller », selon Guillaume Delcourt.