
Le bagel fait partie des produits phare à la carte de Factory et Co. L'enseigne vise une quinzaine d'unités en Ile-de-France, à fin 2014.
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Alors que sushis et tex-mex sont désormais bien implantés en France, d'autres acteurs venus d'outre-Atlantique tentent de pénétrer le marché. La restauration ethnique de demain sera canadienne ou ne sera pas.
Après le temps du sushi, représenté par de nombreuses enseignes, actives sur le créneau de la rapide, mais aussi de la restauration traditionnelle
Les tendances
- Un développement axé sur la franchise
- Une simplification de l'offre
- Le retour en force du « fast casual»
Une centralisation raisonnée
De nombreux investisseurs arrivent sur ce créneau porteur. À commencer par l'enseigne Factory et Co, qui a ouvert un premier point de vente test dans le nouveau quartier de la Bibliothèque nationale François-Mitterrand. Avec 300 m2, il y avait de quoi satisfaire l'appétit des nombreux clients issus des bureaux alentour. Quatre ans après, Jonathan Jablonski, directeur général de Factory et Co, se montre plus nuancé : « Nous avons ouvert rapidement dans ce quartier, qui était alors promis à un développement rapide. Aujourd'hui, les abords de la Bibliothèque mettent plus de temps à démarrer que prévu. » Mais rien n'arrête Jonathan Jablonski, qui, sûr de l'avenir d'une restauration à dominante canadienne en France, ouvre, en septembre 2011, une deuxième unité dans un quartier dynamique : Bercy village. Et c'est l'explosion. Un contrat a d'ores et déjà été signé avec la foncière Unibail, qui formalise une prochaine implantation sur le site de l'aéroport Charles de Gaulle, au sein du tout nouvel espace commercial Aéroville. Enfin, ce sera le centre commercial Les Quatre Temps, à la Défense, en décembre prochain. « Je me suis formé dans le New Jersey, afin de connaître parfaitement les produits. Nous importons la plupart des matières premières directement du Canada », reprend Jonathan Jablonski. Le développement de Factory et Co obéit à une logique de centralisation raisonnée, avec l'implantation progressive de petites unités centrales de production, appelées « atelier de production centralisé » desservant les points de vente environnants, la finition étant réalisée sur place. La première unité centrale verra bientôt le jour à Ivry-sur-Seine (94). Objectif de l'enseigne : une quinzaine d'unités en Ile-de-France, à fin 2014, puis un essaimage progressif dans les grandes villes, toujours en s'appuyant sur un atelier de fabrication centralisé. Si les ateliers sont propriétés du groupe, le développement des points de vente se fera en franchise.
Nous avons pris la master-franchise le 1er novembre dernier, persuadés que l'offre de Presse Café pouvait se décliner et s'adapter au goût parisien.
Gérard Djian, master-franchiseur France Presse Café
Un modèle de « fast casual » réussi
Autre exemple de ce vent canadien avec Presse Café, que son master franchiseur en France, Gérard Djian, définit comme « le premier modèle de "fast casual" réussi en France ». Ce concept canadien, qui totalise quatre points de vente dans l'Hexagone, a vu le jour il y a cinq ans à Montréal. Aujourd'hui, une centaine de points de vente existent dans le monde. « Nous avons pris la master franchise le 1er novembre dernier, persuadés que l'offre de Presse Café pouvait se décliner et s'adapter au goût parisien », explique Gérard Djian.
Le point fort de l'enseigne est de permettre au client de décompresser tout en se restaurant, sans contrainte de temps. Wi-Fi, livres et presse sont à sa disposition, dans un environnement cosy. « On est comme à la maison. Nous déclinons la notion de décompression à tous les niveaux. En termes d'offre, nous proposons des salades faites maison, avec des touches canadiennes, le tout servi dans de généreuses proportions. » À la différence des autres enseignes qualifiées sur le créneau de la rapide, Presse Café utilise systématiquement des contenants en porcelaine. Le matin, à côté du café expresso, l'enseigne propose le café filtre à l'américaine, des pancakes, muffins et des omelettes.
Aujourd'hui, le snacking a redistribué les cartes, même si tout reste à faire.
Bernard Boutboul, PDG de Gira Conseil
Marchés de niche
Les exemples prolifèrent. Pour autant, cette frange de la restauration venue d'ailleurs reste « négligeable sur l'ensemble du marché, assure Bernard Boutboul, P-DG de Gira Conseil. Ce sont des marchés de niche, à côté des grandes catégories que sont le grill, les fruits de mer et poissons, et la restauration asiatique dans sa globalité. Des expériences, notamment sur le créneau tex-mex en rapide, ont été tentées il y a une vingtaine d'années, et se sont soldées par des échecs. Le pays n'était pas prêt. Aujourd'hui, le snacking a redistribué les cartes, même si tout reste à faire. » Et de citer l'arrivée d'acteurs allemands, avec Stube, et ces fameux canadiens « qui regardent de très près notre marché. »
Mais alors, quid du sushi, produit phare de la rapide ces cinq dernières années ? « Les acteurs ont probablement surestimé le marché, estime Bernard Boutboul. Il ne s'agit pas d'un produit de masse, mais de poisson cru, fragile, très cher. Il paraît difficile de reproduire avec le sushi ce qu'a connu le burger il y a trente ans. »
Il est vrai que la France a été désertée par les acteurs étrangers pendant plusieurs années. Une tendance qui semble s'inverser. Burger King revient s'installer dans le pays. D'autres acteurs lorgnent également le marché français, comme le canadien Chipotle, leader mondial du tex-mex en restauration rapide, qui compte deux unités en France. Pas assez pour inquiéter El Rancho, implanté depuis vingt ans en restauration assise, et qui développe depuis peu un concept sur un format plus rapide.
Nous importons la plupart des matières premières directement du Canada.
Jonathan Jablonski, directeur général de Factory et Co
On peut se demander si le Français est désormais prêt à lâcher du lest en matière d'offre en restauration. Le pays serait-il devenu moins traditionnel ? Au-delà du paramètre temps, devenu incontournable sur le créneau du déjeuner, le client semble désormais disposé à explorer de nouveaux horizons, pour autant que l'offre soit cohérente et réponde à son besoin de nomadisme.