Non, Henri IV n'aurait rien à voir avec la poule au pot ! Mais alors qui voulait mettre le gallinacé sur la table des Français ? Prenez un peu de ce bouillon... de culture.
« Si Dieu me donne encore de la vie, je ferai qu'il n'y aura point de laboureur en mon royaume qui n'ait moyen d'avoir une poule dans son pot. » La légende prête à Henri IV cette formule adressée au duc de Savoie, avec qui il se serait disputé. Le roi, natif de Pau - ça ne s'invente pas -, devait alors reconstruire la France, meurtrie par plusieurs décennies de guerres religieuses. Pour remettre en marche la machine agricole, il aurait préconisé de consommer de la volaille, notamment le dimanche. Le succès de cette formule politique avant l'heure ne se démentira plus. À l'aube de la révolution française, on chante : « Enfin la poule au pot va être mise. On peut du moins le présumer. Car depuis deux cents ans qu'elle nous est promise, on n'a cessé de la plumer. »
Un classique revisité
Voilà pour la légende. Oui, la légende, car on ne commence à associer Henri IV et la poule au pot que cinquante ans après sa mort. Il faudra attendre le XIXe siècle pour que Louis XVIII reprenne cette formule à son compte, en ajoutant qu'Henri de Navarre aurait promis la poule au pot chaque dimanche sur la table des Français...
Aujourd'hui, on mange de la poule au pot même en semaine. Au restaurant la Poule au Pot, rue Vauvilliers (Paris 1er), on ne se couche pas avec les poules, puisque l'on sert ce plat emblématique toutes les nuits jusqu'à 5 heures du matin. Le propriétaire des lieux depuis quarante ans, Paul Racat, s'accommode bien avec la légende d'Henri IV : « Ravaillac a assassiné Henri IV à 200 mètres d'ici, rue de la Ferronnerie. Autant lui attribuer la poule au pot ! » Bouillon savoureux à souhait, légumes de pot-au-feu croquants, poule juste cuite comme il faut : ici, on ne badine pas avec la tradition.
Preuve que les grands classiques sont intemporels, le plat a été réinterpreté par Michel Roth et Thierry Burlot lors de la semaine du goût 2010. Au menu, bouillon plus clair et poule tendre. Voilà pour Paris. Et en régions ? Le Bistrot de la Cathédrale, à Chartres, propriété de la famille Jallerat (Le grand Monarque), est un passage obligé pour déguster ce plat, à une heure de Paris.