de nombreux facteurs déterminent la qualité d'une huile : le terroir, l'arbre, la feuille, la fertilisation, l'irrigation...
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L'huile d'olive permet d'effectuer un voyage « immobile ». Dès l'Antiquité, les anciennes civilisations l'utilisaient déjà en cuisine. C'est également à elles que l'on doit le développement de l'olivier sur tout le pourtour méditerranéen. En France, autrefois, seul le Sud avait adopté ce corps gras, considéré par beaucoup de non-adeptes comme trop odorant et trop marqué en goût.
De rigoureux critères de qualité
Les choses ont changé depuis une dizaine d'années. L' « or vert » bénéficie d'une nouvelle image, liée à la santé et au « naturel ». Les résultats concluants du régime crétois (méditerranéen) ont fait prendre conscience aux consommateurs, soucieux d'équilibre nutritionnel et de santé, que l'huile d'olive possède de nombreuses vertus, notamment grâce à sa richesse en corps gras monoinsaturés et à ses bienfaits sur le plan cardio-vasculaire.
« Fabricants, boutiques spécialisées et restaurateurs ont contribué à la faire découvrir, car force est de constater que la plupart des clients ne sont pas formés à l'huile d'olive », déclare Bertrand Lebugle, directeur de la restauration Novotel-Mercure France, par ailleurs sommelier et spécialiste de l'huile d'olive.
Il remarque en particulier qu'aucun travail n'a été mis en oeuvre autour de ce produit. On se contente parfois de faire du marketing en proposant l'huile d'olive dans un joli flacon digne d'un grand parfum. Une des rares informations qui circulent concerne le prix : à savoir qu'une bonne huile coûte cher. Or, les amateurs regrettent l'absence d'histoires, de rêve autour du produit, et de mode d'emploi.
« Il ne viendrait à l'idée de personne de servir le même vin pour des mets différents. Pour l'huile d'olive, c'est pareil ! Je trouve limitatif de l'associer uniquement à l'assaisonnement de la salade », explique Bertrand Lebugle.
L'huile d'olive se découvre et s'apprécie en effet comme un grand cru. La couleur, les analyses olfactives et gustatives (longueur en bouche, intensité gustative, équilibre gustatif) vont permettre d'évaluer qualitativement la qualité d'une huile, et celle-ci n'est pas le fruit du hasard. Un grand nombre de facteurs peuvent l'altérer. Et ce, avant même la récolte. Puisqu'interviennent nombre de critères comme le terroir, l'olivier, la taille, la feuille, la protection phytosanitaire, la fertilisation, l'irrigation... Impossible de négliger un éventuel problème de contamination extérieure dans un moulin ou des moisissures dans le verger, qui peuvent se révéler néfastes.
Mais, pratiquement, au moment de l'achat, face à des dizaines de bouteilles comment repérer une huile de qualité ? Il faut avant tout opter pour une huile vierge extra ou vierge ; sans aucune de ces précisions, l'huile d'olive est un mélange d'huile vierge et d'huile raffinée.
Assemblage interdit
Il faut ensuite chercher le millésime. « Si aucune année n'est indiquée, cela signifie que l'huile est un assemblage de deux années », explique éric Verdier, dégustateur et directeur qualité pour Oliviers & Co. Si seule figure la mention « produit en Espagne ou en Italie », elle peut avoir été achetée ailleurs, mais assemblée dans le pays en question.
L'utilisateur doit aussi vérifier la présence du nom du verger ou du domaine. Un château X permet d'identifier le verger d'origine tandis que le moulin X ne permet pas de connaître la provenance. Plusieurs producteurs peuvent, en effet, solliciter les services d'un même moulin.
L'huile d'olive est un produit unique. « D'une récolte à une autre chez un même producteur, il y aura des variations de qualité. L'homme, dans ce cas précis, n'en est pas responsable. La climatologie et l'alternance naturelle de production en fruits de l'olivier vont déterminer grandement la qualité de l'huile », commente éric Verdier.
Toutes les étapes sont capitales pour l'obtention d'une huile d'olive de qualité. Du terroir au conditionnement, en passant par le pressurage des olives. Il est important que l'huile obtenue ne soit pas mélangée avec une autre d'une cuve différente, même si celle-ci a été pressée le même jour. L'assemblage de deux huiles d'une même variété, d'un même verger, d'une même récolte est vivement déconseillé. Car le caractère singulier de chaque pressée disparaît dès qu'il y a assemblage. Il n'y a pas de symbiose possible entre deux huiles d'olive. Le mélange de deux huiles de qualité en produit une ordinaire.
Pour l'heure, les Français se contentent souvent d'exiger sur l'étiquette l'appellation « 1re pression à froid », synonyme pour eux de qualité. Si, autrefois, les presses étaient moins performantes et nécessitaient plusieurs pressions, actuellement, on ne presse plus qu'une seule fois. La dénomination est donc un peu dépassée. On continue pourtant de trouver cette indication sur les conditionnements. Elle présente au moins l'avantage d'avertir que l'huile n'est pas raffinée.
Dans les établissements, il est de plus en plus fréquent d'utiliser différentes appellations d'huile d'olive. Ce regain d'intérêt pour « l'or vert » et ses parfums en cuisine a stimulé la créativité des cuisiniers qui se sont penchés sur les vertus d'autres huiles tout aussi goûteuses, telles celles de sésame, de noix, de noisette, d'argan ou aromatisées (ail, truffe, orange, basilic, thym...). Car, aujourd'hui, le choix de l'huile signe une recette.
Les outils de formation restent à inventer
« Outre les boutiques, le développement du marché de l'huile d'olive passe par l'éducation des clients et des utilisateurs. Pourquoi ne pas imaginer, au restaurant, quelqu'un qui, à l'image d'un sommelier pour le vin, serait chargé de sensibiliser au bien-être par l'approche du produit ? La méthode comparative est instructive », affirme Bertrand Lebugle. Et de suggérer d'autres pistes : « Le chef peut prévoir, pour une même recette de pâtes, un choix de trois huiles d'olive (andalouse, italienne, grecque) spécifiées sur la carte. Une idée judicieuse pour susciter la curiosité du client. »
Sans doute est-il encore trop tôt, mais ne pourrait-on pas élaborer des modules de formation pour les élèves de lycée hôtelier, à l'instar de ce qui existe déjà pour les vins, les fromages et, depuis peu, pour le café ?
Et le spécialiste de conclure : « Je suis persuadé qu'il s'agit d'une tendance lourde. Nous sommes dans une phase de quête de produits porteurs d'histoires, comme l'illustre depuis peu l'arrivée du sel pur en provenance de l'Himalaya. Tout porte à croire que l'huile d'olive - compte tenu de son potentiel - est en passe de gagner sa place aux côtés d'autres produits universels tels le pain et le vin. »
Ses avantages
Associée à des notions de bien-vivre et de naturel Reconnue pour ses bienfaits Utilisée pour des créations culinaires ou en note finale Apporte une touche méditerranéenne à la cuisine S'utilise à froid comme à chaud.
90 000 t
90 000 t d'huile d'olive consommées par an en France > 3 000 à 4 000 tonnes de production française
99360 t
99360 t importées en 2004 > 74 % d'Espagne > 23 % d'Italie > 1 % du Portugal > 1 % de Grèce
Estimations ICEX
Pour être sûr de ne pas se tromper
- Facteurs de qualité.
- Une huile d'olive doit être impérativement millésimée et issue d'une culture bannissant tout engrais chimique.
- Seule la définition « huile d'olive vierge extra » est digne d'intérêt Vérifier que figure le terroir d'origine.
- Elle doit avoir été pressurée 4 à 6 heures après la récolte en bouche...
- L'attaque doit être intense, mais pas trop prononcée Le moelleux arrive progressivement .
- La sensation de fluidité est présente.
- La longueur en bouche persistante .
- L'équilibre des saveurs harmonieux .
- Le goût pur.
L'avis de ... Olivier Bausson "un produit à la mode depuis trois mille ans"
Né en Provence, l'olivier a toujours été présent dans ma vie. Il symbolise l'arbre de la civilisation méditerranéenne. J'ai mené plusieurs projets, toujours autour de ce thème, qui m'ont conduit naturellement à la création de l'enseigne Oliviers & Co avec l'ouverture du premier magasin, en 1997. Aujourd'hui, nous en comptons 60 et, dans chacun d'eux, les responsables sont formés pour expliquer, faire goûter et découvrir. Nous proposons une sélection de grands crus et de récoltes réservées, mais le prix ne doit pas être un critère décisif. C'est pourquoi nous proposons des huiles d'un très bon rapport qualité/prix. Pour éviter que l'huile d'olive demeure étiquetée "produit cher". « Mais c'est sans conteste la parution de l'étude sur le régime crétois qui nous a aidés à "décoller". Les restaurateurs ont également contribué à faire découvrir l'huile d'olive en la travaillant autrement, en façonnant de nouvelles recettes de l'entrée au dessert, comme la désormais célèbre recette de fraises à l'huile d'olive et au citron. On a découvert un aliment "passion" qui peut être accessoirement un corps gras et n'est pas exclusivement réservé à l'élite de la gastronomie. En effet, je fréquente des établissements de type bistrots qui utilisent l'huile d'olive comme un ingrédient valorisant leur cuisine. Alors, à ceux qui demandent s'il s'agit d'une mode, je répondrais comme Alain Ducasse : "Oui, c'est une mode... qui a trois mille ans !" »