Très en vogue, le crowdfunding, littéralement « financement par la foule », fonctionne aussi en restauration. Les professionnels sont de plus en plus nombreux à employer cette technique pour financer tout ou partie de leur projet. Et le faire connaître.
66 millions d'euros de financement participatif ont été levés au premier semestre 2014 dans l'Hexagone, et 1 million de Français ont prêté ou donné des fonds, ce qui représente le double de l'an dernier sur la même période, selon une récente étude de l'association financement participatif de France. En pleine expansion, ce mode de financement séduit de plus en plus, y compris chez les porteurs de projets en restauration. Même s'il permet rarement de boucler intégralement la levée de fonds nécessaire à la création d'un restaurant, le crowdfunding est un bon moyen de faire connaître un projet en amont, et de tester sa faisabilité auprès des clients, avant même l'ouverture concrète. C'est, entre autres, ce qui a séduit Norman Kolton et Rémi Loupiac, créateurs de Mama Street, un concept de restaurant street food thaï, dont la campagne de financement, démarrée en avril dernier, vient de s'achever. Bilan : 25 000 E récoltés auprès de 200 participants. Une somme jamais levée auparavant pour un concept food parisien. « Le crowdfunding permet de faire une communication plutôt corporate autour du projet, en tant qu'entreprise. De fil en aiguille, nous avons eu une avalanche de "like" sur Facebook. Ainsi, il est plus facile de faire connaître le projet. De plus en plus de jeunes banquiers conseillent de passer par la case crowdfunding pour monter un projet. Mais cela prend du temps. Il faut convaincre, être omniprésent. La somme récoltée représente 5 % de notre investissement global, alors qu'il faut lever au moins 30 % pour rentrer dans les critères d'octroi du prêt bancaire, témoigne Norman Kolton. Au final, vous gagnez surtout de la crédibilité, puisque vous avez su séduire. »
Quelle utilisation réelle ?
Le crowdfunding, oui, mais comment ? outre les grandes plate-formes généralistes comme KissKissBankBank ou Ulule, il existe des sites exclusivement dédiés au financement participatif de projets en CHR. C'est le cas de foodraising.com. Mise en ligne il y a six mois, après un an et demi de gestation, cette plate-forme a été la première à traiter de gastronomie. depuis, six projets ont été financés, pour des montants allant de 1 700 à 25 000 E. Actuellement, deux sont en cours. « Le porteur de projet vient nous soumettre son idée. Nous discutons avec lui afin de savoir ce qu'il veut, le montant, l'objectif. Nous avons une méthodologie en interne pour analyser finement chaque dossier », explique Florian Nègre, créateur du site Foodraising.com. Avec une idée maîtresse : adapter le montant aux possibilités réelles. « Nous ne traitons que des projets à but réellement entreprenarial, en offrant une réelle analyse financière. Mais notre fonctionnement reste souple, car l'utilisation des fonds est un engagement contractuel du porteur de projet. » Et c'est souvent la question qui revient à propos du crowdfunding : quid de l'utilisation réelle des fonds récoltés ? Si les plateformes ne font pas d'audit a posteriori, Florian Nègre assure : « L'initiateur du projet engage sa réputation auprès des contributeurs. Il n'a pas intérêt à utiliser les fonds récoltés à mauvais escient. »
Un test grandeur nature
Mais le crowdfunding ne s'adresse pas uniquement aux créateurs. Il est également un excellent vecteur de communication marketing pour faire parler d'un établissement existant, sous un aspect précis. Une rénovation, un agrandissement, de nouveaux services entrent dans le cadre du financement participatif. Avec, à la clé, un regain de notoriété si la campagne est bien menée. « C'est aussi l'un des avantages du crowdfunding. Cela permet de tester un projet ou une idée, grandeur nature, avant même d'engager des fonds. Si votre campagne ne rencontre pas le succès espéré, vous pouvez légitimement vous demander si votre idée est viable », reprend Florian Nègre. Encore peu utilisé, car très récent, le crowdfunding est en train de gagner du terrain, et risque fort de s'imposer, dans les années à venir, comme un passage obligé dans tout financement. Mais il faut laisser le temps aux marchés et aux entrepreneurs de s'habituer à cette nouvelle manière de lever des fonds, qui concrétise tous les enjeux offerts par une communication virale bien menée.
« Le porteur de projet engage sa réputation auprès des contributeurs. Il n'a pas intérêt à utiliser les fonds récoltés à mauvais escient. » Florian Nègre, Foodraising.com