Bacon Barbeque Burger
© Annabelle Breakey/GettyImages
Fascinés par les États-Unis, les Français s'approprient et cultivent la « food » américaine mieux que les Américains.
1972. Les « branchés » se retrouvent aux Halles dans le premier restaurant à hamburgers typiquement new-yorkais de la capitale, Joe Allen. Bientôt suivi du Diable des Lombards et du Mother's Earth, un bar à cocktails hippie de la rue de la Ferronnerie. Au même moment, le premier McDo s'installe à Créteil. Le coup d'envoi du burger-frites-Coca est donné, et les assiettes françaises ne cessent d'être sous influence américaine. Cette fascination date de la fin de la Seconde Guerre mondiale, quand les GI's débarquent les poches pleines de chewing-gums et de Coca-Cola.
Si la « junk food » ne cesse pas de nourrir et rassasier les jeunes générations, leurs aînés urbains et trentenaires ont pris la tangente vers les circuits traditionnels. « Tout a commencé en 2011-2012, quand quelques jeunes expatriés sont revenus des États-Unis avec une vision plus conviviale et culturelle de la restauration », commente Noélie Viallet, rédactrice en chef de Paris New York TV. Ces entrepreneurs appliquent les règles apprises dans leurs écoles de commerce à des concepts toujours monoproduits. D'où l'explosion parisienne des restaurants à burgers, des coffee-shops et des bars à jus.
Le burger à la sauce tricolore
Rudy Guénaire, le fondateur de Paris New York, est la tête de file de ce mouvement. En 2011, il ouvre, dans le 10e arrondissement de Paris, son premier restaurant à burgers. Il en gère désormais trois, qui proposent une carte de 4 burgers de qualité française. La viande est issue du cheptel d'un éleveur des Monts d'Arée, David Akpagmagbo.
Les grandes chaînes qui s'imposent dans le paysage français témoignent de l'aura américaine sur la restauration française. Exemple avec Burger King, qui, après quinze ans d'absence sur notre marché, y fait son retour en 2013 - et pourrait bien, d'ici peu, racheter Quick. Un énorme succès qui s'explique par son importante cote d'amour dans notre pays. Les clients n'hésitent pas à attendre une heure pour déguster le fameux Whopper, revu et corrigé pour s'adapter au goût tricolore. Car les Français ont leur exigence. Steak'n Shake l'a bien compris. La chaîne de burgers premium, la quatrième plus ancienne aux États-Unis, qui a ouvert un restaurant à Cannes en 2014 - et qui compte bien multiplier les ouvertures en France -, a su prendre en compte l'importance, pour les consommateurs européens, de la traçabilité de leur alimentation. Elle privilégie ainsi les produits de qualité et d'origine locale, sélectionnés auprès de producteurs européens.
Si la burgermania est à consonance new-yorkaise, tout comme la vague des bagels et des cheese-cakes, la côte ouest est elle aussi inspirante, avec une vague montante de sea food. À l'inverse des burgers, celle-ci est portée par de jeunes chefs qui cherchent ailleurs l'inspiration. Adrien Ferrand, l'ex-chef du Kitchen Gallery Bis, et son comparse Galien Emery, du restaurant Pur du Park Hyatt Vendôme, partent, pendant un an, visiter les cuisines nord et sud-américaines, avec l'objectif d'ouvrir, à leur retour, un établissement de cuisine française qui reprendra cuissons, assaisonnements, bouillons de là-bas. On s'approche là de la health food, ce courant initié par des célébrités telle Gwyneth Paltrow, et qui, grâce aux réseaux sociaux, s'est étonnamment démocratisé. « Nous avons vu nos produits sans gluten, conçus à l'origine pour répondre à des problèmes d'intolérance alimentaire, sortir de leur cadre et avoir une croissance à deux chiffres, dès lors que les grandes surfaces les ont mis en linéaires », commente Sébastien Jaffeux, directeur marketing France Schär.
Le chouchou des Américaines
Idem pour le chou kale dont les Américaines raffolent pour ses vertus détox. Inconnu en France il y a quatre ans, il restait introuvable. Exaspérée, Kristen Beddard a lancé The Kale Project pour importer et cultiver ses graines, puis le commercialiser. Résultat : non seulement ce chou est vendu par les maraîchers bio, proposé à la carte de la Société, de l'Arpège ou de Frenchie, mais Exki le met à l'honneur sur sa carte d'automne. Et quand Pascale Sorentinella crée le bar à jus Health Inside, elle s'appuie sur son expérience de végétarienne et ses talents de marketeuse pour étendre ses jus et plats végétariens aux salles de sports, aux épiceries et aux spas. Ce qui rend un feu de paille new-yorkais pérenne à Paris !
Si la « junk food » ne cesse pas de nourrir et rassasier les jeunes générations, leurs aînés urbains et trentenaires ont pris la tangente vers les circuits traditionnels.
Vanté pour ses vertus détox par les Américaines, qui en raffolent, le kale séduit maintenant les Français, de plus en plus adeptes d'une alimentation saine.