Damien Debosque, président d'Api, au côté de sa soeur Brigitte Lefebvre, DG de Lys Restauration, et d'une partie de l'équipe Api du RIE Atrium Euralille.
©
Api Restauration ne manque jamais sa rentrée scolaire ! Celle de 2004 vient encore d'illustrer avec éclat son dynamisme commercial et son expansion régionale, constants depuis une décennie. En septembre, en effet, ses équipes démarraient près de 90 nouveaux contrats. En parallèle, le groupe nordiste de la famille Debosque ouvrait trois agences dans les régions Centre, Haute-Normandie et Basse-Normandie.
Depuis 1994, date de son implantation en Picardie, la première hors du Nord - Pas-de-Calais, Api n'a marqué aucune pause dans son déploiement. Bon an mal an, le groupe ouvre une ou deux régions. Au 1er janvier 2005, ce sera la Bretagne. Avant l'Auvergne et l'Aquitaine, où Api gère déjà quelques restaurants.
Dans la même période, le chiffre d'affaires du numéro cinq de la restauration collective concédée aura progressé d'au moins 15 % par an, avec des pointes à 20 %. Ce qui en fait le champion français de la croissance en restauration collective concédée.
Un succès qui s'appuie sur la promotion des hommes
Pourquoi alors un tel appétit, assorti, de surcroît, d'une vraie agressivité commerciale ? La question paraît presque incongrue à Damien Debosque, son très entreprenant président de 45 ans : « C'est une démarche tout à fait naturelle dans la vie d'une entreprise », répond-il.
Et n'allez pas lui parler d'une course à la taille critique. « Elle n'est pas indispensable dans notre métier, chaque contrat génère son équilibre. L'intérêt de massifier les achats est marginal, au regard des attentes clients et de la personnalisation des prestations. » L'expansion d'Api Restauration ne s'est donc pas accompagnée d'une centralisation des menus et des achats. Damien Debosque, en fait, ne voit pas d'autres conditions à celle-ci que les moyens financiers du groupe (l'endettement n'est pas le genre de la maison) et, plus encore, ses ressources humaines.
Le modèle de croissance choisi par Api, exclusivement organique, à l'opposé de ses concurrents, repose en effet largement sur sa politique de recrutement et de promotion interne. La plupart des postes clés sont confiés à des collaborateurs de longue date. « Didier Delva, par exemple, le directeur de la nouvelle région Centre, a débuté chez nous en 1994 comme chef de cuisine à Villeneuve-d'Ascq. C'est formidable pour lui et pour l'entreprise. Le directeur régional Pays de la Loire, José Cardon, fut auparavant gérant, puis chef de secteur. Quelle réussite ! »
Un modèle qui ne s'apparente pas non plus à une fuite en avant. L'expansion actuelle du groupe n'est pas l'antidote à un effritement de ses régions historiques. « Nous perdons très peu de clients privés, assure Damien Debosque. Sur les marchés publics, le turn-over est plus difficile à maîtriser. Malgré tout, nous avons pu regagner par la qualité de grands appels d'offres que nous avions perdus, comme Villeneuve-d'Ascq et Marcq-en-Baroeul. »
Viser les segments porteurs
Sur le dernier exercice, ces régions historiques ont donc généré encore les deux tiers de la croissance globale du groupe. Le Nord- Pas-de-Calais, entre autres, affiche + 13 % cette année. Les nouveaux territoires en génèrent un tiers. La progression y est, certes, très forte, mais pèse moins en valeur. Cependant, la seule région Pays de la Loire, ouverte en 2001, avait déjà réalisé 8 ME en 2003, avec 66 restaurants en portefeuille, et cela sans disposer de cuisines centrales.
Api Restauration fait donc mentir une réputation de spécialiste unique des livraisons de repas à partir de cuisines centrales. En réalité, celles-ci ne drainent que 18 % du chiffre d'affaires du groupe. Les activités de gestion sont bien la première source de ses revenus, les contrats étant par ailleurs mieux répartis désormais entre les secteurs scolaire, entreprise et santé-social, ce dernier segment étant en outre en plein boom.
Cette pénétration des segments les plus porteurs du marché est un autre levier de la croissance du groupe de Mons-en-Baroeul.
Sur les cuisines centrales, Api s'est aussi d'emblée différencié de ses concurrents nationaux en choisissant d'investir en propre, refusant de se développer par les délégations de service public. « L'avenir de ces contrats est gagé, estime le patron d'Api Restauration, car leur assise juridique est précaire, et les collectivités locales se rendent compte qu'il n'est pas de leur intérêt, au nom de la bonne gestion des deniers publics, de faire appel à ce type de formule, dont elles deviennent, finalement, les prisonnières. »
Le groupe Api d'aujourd'hui reste ainsi fidèle aux métiers que Jean Debosque, le père de Damien et sa soeur Brigitte (à la tête de la filiale Lys Restauration) avaient créés à partir du début des années soixante. C'est en reprenant la boutique de son père, une boucherie-charcuterie-traiteur de Lille, que Jean s'est d'abord lancé dans la livraison de repas aux entreprises. En 1964, il crée une cuisine centrale à Mons-en-Baroeul, l'une des toutes premières construites par une société de restauration collective. C'est à la fin de cette même décennie qu'il s'engageait dans la gestion de restaurants collectifs. Quarante ans plus tard, Api excelle toujours à creuser ce sillon familial, à l'échelle nationale, cette fois.
Sept leviers pour grandir
- Primauté de la croissance interne
- Indépendance financière
- Maillage progressif du territoire par agences régionales et cuisines centrales en propriété
- Centrage sur le métier de base
- Politique dynamique de ressources humaines
- Large autonomie opérationnelle
- Priorité à l'expansion et à la satisfaction plutôt qu'aux résultats
Trois questions à Damien Debosque Président d'Api Restauration
« le choix des hommes et de l'indépendance »
Quels sont les leviers de développement d'Api ?
D. D. Celui-ci repose sur trois valeurs : tout d'abord, la qualité et la cohésion des équipes. Nous essayons de construire la confiance par la formation, la promotion des hommes, la communication interne. Notre deuxième valeur, c'est la créativité. Je ne vois pas d'autre solution durable à la croissance que d'apporter des innovations et des produits sans cesse renouvelés. Il faut aussi que l'encadrement et la direction s'impliquent dans cette recherche de valeurs ajoutées pour le client. Et cela passe également par l'expérimentation. La troisième valeur, c'est la décentralisation, le pouvoir sur le terrain. Dans nos 800 restaurants, les gérants établissent les menus. Ils choisissent leurs fournisseurs dans le cadre d'un référencement large avec, par famille de produits, trois fournisseurs, souvent régionaux ou locaux. Ils peuvent aussi, au besoin, et sans pénalité, acheter à des fournisseurs non référencés. Ce n'est peut-être pas l'organisation optimale pour majorer les résultats, mais c'est en tout cas celle qui maximise la satisfaction de nos clients et de nos salariés.
Vous n'avez jamais réalisé d'opérations de croissance externe significatives. Pourriez-vous en envisager ?
D. D. Non. Notre croissance est avant tout basée sur la promotion des hommes. Nos directeurs régionaux sont pour la plupart issus de la promotion interne. Et nous démontrons une capacité permanente à attirer des collaborateurs d'excellence qui viennent chercher dans nos métiers des valeurs qu'ils n'arrivaient plus à défendre. Dans un métier à forte valeur ajoutée humaine, c'est bien la motivation intrinsèque de chacun pour son métier et pour son entreprise qui fait la performance d'une société sur son marché. Api a un formidable réservoir d'énergies et de compétences, nous devons les mettre en vibration.
Envisagez-vous de modifier votre actionnariat ?
D. D. Nous n'avons aucun impératif à le faire évoluer. Notre actionnariat est familial et le restera longtemps. Nous excluons une alliance, nous y perdrions notre âme. Nous n'envisageons pas non plus une introduction en Bourse, tant qu'elle sera un lieu où les entreprises ont du mal à privilégier le moyen et le long termes.
Les chiffres clés
- 120 M € de CA* 2004 (clos 31 août) +15,7 % de croissance en 2004
- 1,5 % environ de résultat net 2003
- 1 850 salariés, dont 89 cadres et 201 agents de maîtrise
- 10 cuisines centrales en propriété
- 800 restaurants en gestion
- 20 agences ouvertes, 16 régions couvertes * Cumul des CA d'Api Restauration, de Régionale de Restauration et de Lys Restauration.